Les peines d’amour sont des mines à ciel ouvert. Je me réveille à quatre heures quarante du matin pour écrire ça. Je me réveille devant mon assiette, je me réveille en marchant, je me réveille dans l’autobus. Mes phrases fonctionnent encore, même si elles sonnent dix-huit cent soixante quelque. Il y a des moteurs de raison qui s’échappent même si je ne veux rien savoir. Personne ne peut m’aider. On a déplacé des maisons sur de gros camions lourds, creusé de longues bandes de terrain fertile, exposé à la roche sale un kilomètre carré de peur/dépendance. Tout le monde voit les plâtres amanchés n’importe comment sur les mots qui sortent de ma bouche. Quand je pense à toi, je te revois à côté de ce vieux hangar à bateau délabré, dangereux, dans lequel tu jouais toute petite, sur les berges de Pincourt. Cabane à spéculations amoureuses, entrepôt ridicule pour regarder la nouvelle 30 briller. Faire n’importe quoi avec toi comme regarder la nouvelle 30 briller à côté d’un hangar sale. Faire n’importe quoi avec toi la nuit et appeler les loups pour qu’ils viennent calmer ma viande confuse.
Bertrand Laverdure, « Les peines d’amour... », Rapport de stage en milieu humain, Triptyque, 2014, p. 17.
Note lors d’une récitation : on traitera la barre oblique comme un autre signe de ponctuation et on récitera « peur [silence] dépendance ».